Interview de Marc Bourhis, Directeur Général des Services de la Communauté de Communes Cœur Côte Fleurie
(11 communes – 20 000 habitants)


Marc Bourhis

Quelles sont les principales étapes de votre parcours territorial ?

Je suis arrivé dans la « Territoriale » un peu par hasard. Jeune professeur agrégé d'éducation physique, je prépare au Ministère des Finances l'ENA en interne, en 1989. Marcel Liabastre, Maire de Honfleur, me demande d'être sur sa liste ce qui me contraint de chercher un nouveau travail en Normandie. Me voilà devenu directeur des sports de la ville de Caen. J'ai prévu de rester 3 ans seulement. Je reste 13 ans. Cette première expérience de direction auprès de Jean-Marie Girault, Sénateur-Maire de Caen, a été exceptionnelle. Il m'a permis, après avoir restructuré, de piloter presque sans limite des dossiers importants pour la ville tant au niveau des équipements, des clubs professionnels et amateurs que d'un point de vue événementiel. Le sport à Caen était une religion ! Avec comme conséquence directe, une délégation de signature, beaucoup de liberté d'action et donc des responsabilités. Parallèlement, je vivais également ma première expérience d'élu local à Honfleur en tant qu'adjoint aux Sports et à la jeunesse. Avec ce mandat, j'ai eu la chance d'appréhender et de gérer mes projets avec une double casquette (élu / directeur). En 2003, je fais mes premiers pas dans l'intercommunalité à la Communauté d'Agglomération de Caen-La-Mer en qualité de DGA chargé des services à la population. Ce poste m'a permis d'élargir l'horizon en couvrant un large spectre de compétences : culture, sport, habitat-logement, gens du voyage, littoral, politique de la ville. J'ai du apprendre à bien m'entourer et l'ai fait sans recrutement externe. J'ai choisi de faire confiance à de jeunes fonctionnaires qui depuis, pour certains sont passés de C à A ! Puis, je rencontre Philippe Augier en 2006, Maire de Deauville puis Président de la Communauté de Communes Cœur Côte Fleurie. En tant que Directeur Général des Services, trois priorités de mandat m'ont été données : le développement de l'économie touristique en diversifiant par le sport et la culture, le développement territorial en s'appuyant sur le numérique et une gestion économe permettant d'investir pour l'avenir. Priorités passionnantes et qui continuent d'alimenter le goût du challenge et de l'innovation qui nous animent mutuellement.

Tout au long de ce parcours territorial, j'ai eu la chance de travailler avec des hommes de projet, des maires – présidents dans l'action : entrepreneurs, bâtisseurs, humanistes, passionnés par leur territoire.

 

Quel projet professionnel a été particulièrement marquant ? 

Il y en a plusieurs !

En 2003, la Communauté d'Agglomération de Caen-La-Mer s'est agrandie de 18 à 28 communes. Ainsi, nous sommes passés de 30 à 750 agents en une nuit. Ce qui m'a valu des séances de travail très intenses avec le président Luc Duncombe. Cette intégration a été une expérience très riche et intéressante. Ensuite, à la Communauté de Communes Cœur Côte Fleurie nous avons effectué 120 millions d'investissements en 7 ans tout en réduisant les charges de fonctionnement avec notamment le premier réseau numérique d'initiative publique avec la fibre optique à l'entreprise et à l'habitant.   Les grands opérateurs privés étaient tous contre nous, et nous n'avons pas cédé sur un projet structurant pour l'avenir. J'ai également engagé quelques projets « coup de cœur » comme la création d'un club entreprise « apassionatto » pour le financement de l'orchestre de Caen qui a permis à des enfants issus de quartiers défavorisés d'assister à des concerts et des spectacles. En 2000, aussi des spectacles d'enfants au Zénith attirant  12 000 spectateurs et offrant la recette à l'Association Pascal pour financer l'aménagement d'une chambre pour les parents des enfants en traitements lourds au CHU de Caen.

Tous ces projets ont demandé les mêmes compétences et les mêmes convictions : au gré des spécificités de chacun, il a fallu créer l'adhésion des équipes et mettre en œuvre rapidement ces projets en optimisant les charges et trouvant des recettes nouvelles. C'est un véritable challenge managérial : faire en sorte que chacun se sente acteur de ce qui se met en place et s'investisse à fond. Pour ce faire, il faut de la confiance, le goût du risque et de la réelle responsabilité, accompagner ces changements d'un plan de formation pour que tout le monde soit au niveau et si ça ne fonctionne pas, la grande chance de la FPT est la mobilité ! 

 

Quel est votre dossier d'actualité ?

La mise en place des compétences promotion du Tourisme et Gémapi.

Concernant le tourisme, avec Philippe AUGIER, nous avons réagi très vite et nous serons les premiers dans notre Département à créer une SPL regroupant 10 communes autour de la marque Deauville – la commune de Trouville-sur-Mer ayant préféré un EPIC intercommunal autour de sa station classée.

Autre sujet, l'eau potable intéresse beaucoup nos amis des Départements et l'Etat qui veulent préempter notre compétence que nous gérons efficacement depuis 40 ans, au profit de gros syndicats qui coûteront plus cher ! Mais nous résistons, la loi NOTRe propose en 2020  aux EPCI ce que nous faisons depuis longtemps et l'intercommunalité est la bonne échelle. En revanche,  je pense que l'intercommunalité n'est pas la bonne échelle pour gérer la compétence Gémapi. La France a perdu ses compétences techniques, notamment dans la protection contre la mer, les périmètres ne sont pas pertinents et les responsabilités sont trop diluées. L'échelle départementale, interterritoriale voire les bassins versants me semblent être plus adaptés.

 

Qu'est-ce que vous apporte l'ADGCF ?

C'est un réseau d'experts et d'expériences incontournables pour un DG d'intercommunalité. En tant que délégué régional, je souhaite développer avec les collègues le réseau Nord-Ouest car il est impératif que l'association soit présente partout car nous représentons l'échelon d'avenir ! L'association nous a permis d'engager un dialogue commun avec la Région. Nous avons participé à des réunions de consultation sur les grands schémas avec l'AdCF. Ce travail a porté ses fruits. Lors de notre réunion commune à Louviers, le Président de la Région Normandie, Hervé Morin, nous a assuré de contractualiser  désormais en priorité avec les intercommunalités.

Par ailleurs, je me suis particulièrement investi sur le volet économie touristique car mon territoire est une terre d'innovation dans ce domaine. Dans ce cadre, je me tiens à la disposition des collègues qui souhaiteraient partager des expériences, voire solliciter des conseils pour le transfert de la compétence « promotion du tourisme » et préparer un renouvellement ou un développement de leur attractivité territoriale.

Enfin, le niveau des travaux et la production d'études de l'ADGCF sont remarquables pour une aussi petite équipe, je leur en suis reconnaissant et invite tous les collègues à s'en saisir !

  

[28/09/2016]