" Uniformément médiocres ? "
Trois Français sur dix estiment vivre dans un territoire délaissé des pouvoirs publics : c'est le constat que dresse une récente étude du Crédoc commanditée par le CGET. Dans un pays qui consacre près de 60 % de son PIB à la dépense publique, le chiffre détonne. In fine, il questionne l'efficacité des politiques menées par l'Etat et les collectivités territoriales. Faut-il alors les considérer comme uniformément médiocres ?
Apportant de l'eau au moulin des chantres de la « fracture territoriale », l'enquête révèle que l'impression d'abandon s'exprime tout particulièrement dans les territoires éloignés des dynamiques métropolitaines, communes isolées ou limitrophes des bourgs de petite taille. Pour cette frange de la population, hors de question cependant de quitter le lieu de résidence et d'envisager une mobilité vers un territoire à potentiel : c'est plutôt une consolidation de l'attractivité de leur espace de vie quotidien menée sous l'égide de l'administration publique qu'attendent ces citoyens et ce, dans des domaines clairement identifiés : la création d'entreprises, le déploiement de transports collectifs et l'amélioration de l'offre de santé… Première hypothèse : c'est une équation à deux inconnues que doivent résoudre l'Etat et les collectivités : garantir le principe d'égalité territoriale d'une part, tout en soutenant les moteurs de l'économie nationale que constituent les grandes agglomérations d'autre part. Sauf qu'à rebours de cette vision trop caricaturale, nombre de territoires périphériques et de villes moyennes sont aujourd'hui en bien meilleure santé socioéconomique que certaines de nos rutilantes métropoles…
Seconde hypothèse : comme l'y invitent Xavier Desjardins et Martin Vanier dans un récent article intitulé Pistes pour une refondation, urgente, de l'aménagement du territoire, peut-être faut-il plus simplement changer de logiciel et passer d'une logique qui ne reconnaît que la « proximité » comme réponse univoque à l'expression des besoins locaux à une autre qui valorise davantage l'« accessibilité » fondée, à l'ère du numérique, sur l'usage d'un ensemble de réseaux (services à la personne, administration, formation…) et la « réciprocité », visant la mise en partage des services entre les territoires plutôt que la définition d'un panier de services minimal correspondant à une échelle territoriale. Tel a été le sens des propos tenus par notre Président à l'occasion d'un débat sur le devenir des services publics organisé dans le cadre du dernier Congrès des Maires.
C'est bien cela que veut explorer l'ADGCF à travers le travail de réflexion et d'anticipation territoriales annoncé lors de son Assemblée Générale d'octobre dernier et qu'elle va mener à la rentrée 2018 : définir une organisation de l'espace qui privilégie le système plutôt que la hiérarchie et l'autarcie.
Jean-François DAUVERGNE
Trésorier de l'ADGCF